Docu - Khrouchtchev à la conquête de l'Amérique
Khrouchtchev
à la conquête de l'Amérique
Année: 2013
Réalisation: Tim B. Toidze
Pays: France
Durée: 59 min
En 1959, le premier secrétaire du parti communiste d’URSS Nikita Khrouchtchev effectue un voyage de dix jours aux États-Unis à l’invitation du président Eisenhower. Entre dégustations de hot-dogs et péripéties hollywoodiennes, la guerre froide en mode ludique !
Résumé: Septembre 1959. Un Tupolev 114 avec à son bord le premier secrétaire du parti communiste d’URSS atterrit à Washington. Une première pour un dirigeant soviétique. Accueilli par le président Eisenhower, Nikita Khrouchtchev – surnommé "Mister K" par la presse américaine – va traverser les États-Unis d’est en ouest pendant deux semaines. Accompagné de sa famille et entouré d'officiels, il visite Washington, New York, Los Angeles, San Francisco, Pittsburgh… À Camp David, les deux chefs d’État entament des négociations pour tenter de mettre fin à la course aux armements…
"Mister K"- Dès le début du voyage, les médias suivent chaque pas, reprennent chaque mot, commentent chaque meeting du leader soviétique sur le sol américain. Si, avant son arrivée, le bouillonnant "Mister K" inspirait plus de peur que d’amusement, ce périple de dix jours mené tambour battant va lui permettre de retourner en sa faveur la presse et le grand-public américains. Ce n’est pas faute, pourtant, de s’être mis en colère – pour avoir été empêché, par exemple, de visiter Disneyland pour des raisons de sécurité – ni d’avoir eu des escarmouches, notamment, avec le maire de Los Angeles ! Mais il a aussi raconté des blagues, et donné sa montre à un ouvrier d’une usine de l'Iowa… Bref, ce one-man show a amplement fourni les rédactions en hot news et les journalistes américains l'ont adoré ! Ce film montre comment cette "conquête de l’Amérique" aurait pu être un tournant dans l'histoire de la guerre froide…
>> Diffusé en France sur arte le mardi 4 mars 2014
>> à revoir en replay jusque lundi 10/03/14
Après avoir passé deux jours à New York, Nikita Khrouchtchev se rend à Hollywood, où la Fox a organisé un grand banquet avec de nombreuses stars, dont Marilyn Monroe, qui va d'ailleurs être interviewée après le discours de Mister K.
Retranscription du passage de K à Hollywood:
(à 22min) Bien qu'avant que Khrouchtchev n'arrive dans l'usine à rêve (à Hollywood), tout le gratin d'Hollywood s'est retrouvé au Café de Paris où se tient le déjeuner avec le dirigeant communiste. Même Marilyn Monroe, pourtant connue pour son retard légendaire, arrive en avance.
Après un rapide repas, le président de la Fox, Spyros Skouras, prend la parole. Son discours commence de manière inattendue (il boit un verre et serre la main à Kroutchev, sous les rires de l'assemblée): "Monsieur le secrétaire, ceci ne faisait pas partie de mon discours. Mais, votre pays est la plus grande entreprise capitaliste, le plus grand monopole du monde entier ! Un bon monopole ! Très bon ! En toute modestie, je vous demande de me regarder. Mes deux frères et moi avons grandi dans un minuscule village grec. Nous venons d'une famille très pauvre. En 1910, nous sommes venus vivre ici. Je suis devenu commis serveur. Grâce au système américain d'égalité des chances, j'ai aujourd'hui le bonheur d'être le président de la 20th Century Fox."
Au tour de Khrouchtchev de livrer son discours: "Vous me faîtes une excellente impression et je tiens à vous exprimer tout mon respect. Mais cela ne m'épate tant que cela. Vous voulez savoir qui je suis ? J'ai commencé à travailler dès que j'ai su marcher. Avant mes 15 ans, j'avais déjà eu une longue liste de métiers. J'ai gardé les veaux, moutons et vaches des capitalistes. Puis j'ai travaillé à l'usine et à la mine. Et regardez-moi ! Aujourd'hui je suis le premier ministre de l'U.R.S.S ! L'Amérique est un beau pays. Les Américains sont formidables. Je suis l'invité de votre Président et de votre merveilleux pays. Mes camarades et moi sommes enchantés de notre séjour. Avant mon arrivée ici, on m'avait donné le programme de ce que j'allais voir. Mais avant mon discours, on m'a dit: 'Non, vous ne pourrez pas visiter cette ville là'. -Comment s'appelle-t-elle ? -Disneyland. J'ai demandé pourquoi et on m'a répondu 'C'est impossible'. Ecoutez bien ! Ecoutez bien ce qu'on m'a dit: 'C'est impossible parce que nous, les autorités américaines, ne pouvons pas y garantir votre sécurité.' Pourquoi ? Y a-t-il une épidémie de peste ou de choléra ? Est-ce que je risque de tomber malade ? Des gangsters ont-ils envahi Disneyland ? Veulent-ils me tuer ? J'avais très envie de voir cet endroit mais je ne peux pas. Voici la situation dans laquelle moi, votre invité, je me trouve. Cela me dépasse. Moi qui croyais que ce pays était bien organisé ! Je ne pensais pas que ma sécurité impliquerait d'être enfermé dans une voiture blindée, sous un soleil de plomb, pendant des heures, jusqu'à ce que je sois complétement desséché ! Je croyais pouvoir me balader librement, parmi les citoyens de cette démocratie, mais non, c'est impossible. C'est grand dommage. Je suis très déçu et très mécontent. Merci de votre attention."
Beaucoup dans l'assistance peinent à y croire: viennent-ils d'assister à une colère du dirigeant de la seconde puissance mondiale parce que sa visite à Disneyland a été annulée ? La réponse est Oui!
Marilyn Monroe est interviewée:
"-Qu'avez-vous pensé du spectacle aujourd'hui ?
-C'était très intéressant.
-Qu'avez-vous trouvé intéressant ?
-Presque tout.
-Et les improvisations ?
-Intéressantes, très intéressantes.
-Vous vous attendiez à ça ? A quoi vous attendiez-vous ?
-A du rosbif ! (crie quelqu'un de loin)
-A que ce soit intéressant."
D'une super production à une autre, sur le plateau 8, la comédie musicale de Cole Porter "Can-Can" est en cours de tournage (avec Shirley MacLaine, Frank Sinatra et Louis Jourdan). Commentaire de Khrouchtchev: "Notre visite à coincider au tournage d'une scène où des jeunes femmes en costumes s'apprêtaient à danser le french cancan. Pendant la danse, elles ont relevé leurs jupons et montré leur derrière, enfin, pas tout à fait, elles ont tout de mêm gardé leurs culottes. Mais quand même ! D'après ce que j'ai vu, c'était un film très Olé Olé. Nous, les soviétiques, nous n'avons pas l'habitude de voir ça. C'était un film pour adultes."
Parmi les invités, d'autres se posent la même question: Mais pourquoi donc avoir choisi ce film précis pour mettre Hollywood en avant ? Une fois la scène de french cancan terinée, K n'a l'air ni choqué, ni offensé. Commentaires de K: "A ce moment là, les photographes ont commencé à me mitrailler, entouré de toutes ces jeunes femmes. J'en entendais un, dire à l'une d'elle qui se trouvait juste à côté de toi: Soulève ton jupon, plus haut, plus haut, plus haut ! Apparemment, il voulait prendre une photo coquine de moi. C'était un geste délibérément anti-soviétique. Je pense qu'il voulait me discréditer en prenant une photo pareille. Je l'imagine dire: 'Regardez, Khrouchtchev est allé à Hollywood et a posé avec des jeunes filles légèrement vêtues'."
(générique de fin): quelques images de Marilyn en couleur.